Ménopause : et si on en parlait autrement ?

Publié le Vendredi 17 octobre 2025

Les femmes en Belgique aujourd’hui ont une espérance de vie de 85 ans. Cela signifie que plus de la moitié de leur vie adulte se déroule en ménopause. Les statistiques belges prévoient qu’en 2070, les femmes belges auront une espérance de vie d'environ 90 ans. À l’occasion de la Journée mondiale de la ménopause, nous avons rencontré le Dr Martine Dehandschutter, Chef de clinique de la Chirurgie gynécologique aux Hôpitaux Iris Sud.

Qu’est-ce que la ménopause ?

« L’âge moyen de la ménopause est de 51 ans et demi. On la définit comme l’arrêt complet des règles pendant 12 mois consécutifs. Avant 45 ans, on parle de ménopause précoce. Avant 40 ans, de ménopause prématurée, souvent d’origine génétique. La ménopause peut être naturelle ou induite par un traitement (chimiothérapie, radiothérapie, certains médicaments) ou par une intervention chirurgicale (ablation des ovaires).

La ménopause ne devrait pas être juste quelque chose à « subir », mais bien une transition qu’on peut accompagner activement. »

Et la périménopause ?

La périménopause correspond à la période de transition, lorsque les ovaires s’essoufflent. Les premiers signes apparaissent : règles irrégulières, bouffées de chaleur, troubles du sommeil, difficultés de concentration (brain fog = brouillard cérébral), changements d’humeur, douleurs articulaires ou variations de poids.

« Le plus difficile est souvent le duo bouffées de chaleur et donc mauvais sommeil : c’est un vrai cercle vicieux », souligne le Dr Dehandschutter.

Une expérience différente pour chaque femme

Chaque femme vit cette étape différemment. Certaines présentent peu de symptômes, d’autres en souffrent intensément. La durée et l’intensité varient : quelques mois pour certaines, plusieurs années pour d’autres.

Quelles solutions pour mieux vivre cette étape ?

 « Le traitement le plus efficace reste le traitement hormonal, mais ce n’est pas la seule option. » Il est aujourd’hui mieux dosé, mieux toléré et adapté au profil de chaque femme, qu’il s’agisse de gels transdermiques, de progestérone naturelle ou de doses minimales. Les hormones (œstrogènes, associés à la progestérone pour protéger l’endomètre) ne servent pas uniquement à soulager les symptômes tels que les bouffées de chaleur, la sécheresse ou les troubles de l’humeur : elles peuvent aussi offrir des bénéfices préventifs, notamment pour la densité osseuse et la composition corporelle.

Des solutions non hormonales existent également, y compris un nouveau traitement ciblant directement le centre de régulation de la température dans le cerveau.

Enfin, des traitements locaux peuvent être proposés pour améliorer la sécheresse vaginale, prévenir les troubles urinaires ou soulager les douleurs lors des rapports.

Bien plus que les hormones seules, ce sont aussi les composantes du “mode de vie” qui font la différence : une alimentation adaptée (le métabolisme ralentit), une activité physique régulière (particulièrement le renforcement musculaire), éviter le tabac et l’alcool, un bon sommeil, la gestion du stress et le soutien social. Ces leviers permettent aux femmes de traverser cette période dans de meilleures conditions.

Idées reçues à déconstruire

Beaucoup de croyances persistent autour des traitements hormonaux et du cancer du sein. Aujourd’hui, les études montrent clairement que le cancer du sein est multifactoriel, plusieurs facteurs étant liés à l’hygiène de vie et à la génétique. Les risques associés à la prise d’hormones dépendent du type de traitement, de l’âge et du profil médical de chaque femme. Nous disposons désormais de plusieurs décennies de recul scientifique, ce qui permet aux médecins de proposer des traitements fiables, mieux dosés et adaptés.

Elle reconnaît les risques (saignements imprévus, risque de thrombose, etc.) mais insiste sur la différence entre risque relatif et risque absolu, et sur le droit des femmes à un choix informé. C’est pourquoi, même après 50 ans, le suivi auprès d’un gynécologue reste essentiel afin d’évaluer la situation individuelle, de dépister d’éventuels problèmes de santé (cancer du sein, cancer du col de l’utérus, ostéoporose, maladies cardiovasculaires) et d’adapter la prise en charge.

La décision concernant le traitement hormonal de la ménopause est le résultat d’une consultation de ménopause dans laquelle la patiente et le médecin discutent de tous les avantages et désavantages du traitement en recherchant une bonne qualité de vie malgré un vieillissement somatique. Nous avons une espérance de vie qui augmente, mais nous voulons surtout vivre bien, actives et accomplies. La ménopause que nous vivons aujourd’hui est différente de celle de nos ancêtres.

Une étape de vie à accompagner

La ménopause entraîne une grande variété de symptômes, mais la majorité des femmes ne connaîtront que quelques-uns d’entre eux : bouffées de chaleur, changements du cycle menstruel, troubles du sommeil, troubles de l’humeur, sécheresse de la peau, des cheveux et du vagin, incontinence urinaire, maux de tête, fatigue, prise de poids.

À plus long terme, la baisse des œstrogènes fragilise les os et augmente le risque d’ostéoporose. Les maladies cardiovasculaires deviennent également plus fréquentes : dix ans après la ménopause, le risque des femmes rejoint celui des hommes du même âge.

Quelques mesures peuvent aider à passer le cap : manger équilibré et enrichir son alimentation en calcium, éviter le tabac, réduire l’alcool, faire du sport (marche, vélo, natation), pratiquer la relaxation (yoga, méditation, tai-chi), prendre soin de son corps (hydratation, massages, soins de la peau), et maintenir un cercle social et des activités stimulantes.

Changer le regard de la société

La ménopause devrait être envisagée comme la deuxième partie après un interlude. Cet interlude consiste en un bouleversement biologique et émotionnel qui redessine l’humeur, le corps et les repères. Mais dans nos sociétés, ce passage reste trop souvent enveloppé de silence et d’indifférence, faute d’éducation et de conversations ouvertes.

Ce tabou a un coût. Car au moment où les femmes franchissent la quarantaine, elles ne devraient pas être reléguées à la marge. Elles devraient, au contraire, être soutenues et reconnues dans cette transition, qui peut marquer l’ouverture d’une nouvelle étape de vie.

La ménopause n’est pas une maladie. Ce n’est pas la fin d’un cycle, mais un nouveau chapitre, à condition d’un accompagnement médical adapté et de changements de mode de vie. Bien accompagnée, elle peut se transformer en expérience positive, plutôt qu’en épreuve silencieuse.

« Il est regrettable et illogique, du point de vue économique, que peu de traitements hormonaux soient remboursés par la sécurité sociale, déplore le Dr Dehandschutter. Une femme en âge de ménopause a de l’expérience dans son travail, elle aide à soigner les membres de sa famille plus âgés, elle aide ses enfants qui entament leur vie professionnelle et familiale. Ceci est un rappel que la santé des femmes, en particulier à cette étape de leur vie, ne devrait pas être reléguée au second plan. »

Et si la ménopause devenait enfin un sujet de société ?

 

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